L'idée est simple, finalement : quite à me lancer, autant garder traces de mes efforts, de mes petites joies et mes grandes émotions de coureuse néophyte ... vous faire part de mes espoirs et de mes doutes aussi ... !

Alors, n'hésitez pas à y faire vos commentaires ! Vos messages sont mes meilleurs soutiens !





jeudi 31 octobre 2013

TRAIL DE BOURBON ... COURAZZZZ MADAME LA ZUPETTE ...!!



" La sagesse suprême est d'avoir des rêves assez grands pour ne pas les perdre du regard  quand on les poursuit... "
William Faulkner



            10 mois !!  10 mois que je préparais cette rencontre !!
            Tout a commencé par un demi-siècle à digérer !! Pour faire passer la pilule, il me fallait un truc grandiose... Quoi de mieux donc que ce Trail du Bourbon ? Autant la Diagonale semblait absolument hors de portée, autant ce Bourbon me plaisait !!
            93 kilomètres  et plus de 6000 mètres de dénivelé positif !! Certes, ce n'est pas une mince affaire, mais justement... C'était ce que je voulais ! Tenter de relever un gros défi, tant sur le fond que sur la forme...

            Après des mois et des mois de préparation - en substance pas loin de 300 heures d'entraînement, près de 1800 km parcourus et quasiment 15000 mètres de dénivelé positif - on peut dire que j'étais prête à en découdre...!!
            Ou du moins, j'avais fait ce qu'il fallait ...!!
            Enfin, je dis ça mais en réalité, comment en être sûre ??? De toute façon, les dés étaient jetés, et c'était à mon tour de me lancer !!! Je prendrai le départ le samedi 19 octobre à 4 heures du matin, ça au moins, c'était certain !!!

            Les jours qui ont précédé le départ me semblent un peu irréels... Difficile de vraiment profiter, à la fois de l'île et des personnes qui m'entourent !! J'ai une douce sensation de flottement, le sentiment assez agréable, mais aussi angoissant, de sentir les jours défiler inéluctablement... Heureusement, je suis accompagnée par Jean-Pierre, mon patient et attentif mari, et par Pascal, son cousin, installé à la Réunion depuis des années et passionné par les merveilles et les dénivelés que son île possède en trésors ! Ils se chargent de régler l'intendance, me laissant libre de cogiter et triturer mes pensées...
            Pourtant, doucement, les choses se mettent en place...



            Mercredi :

            Nous allons chercher mon dossard... Je découvre, le cœur battant et chargé de cette émotion si particulière, les prémices de cette excitation qui ne me quittera plus jusqu'au top-départ !!
            Le stade de la redoute s'offre à moi sous un soleil de plomb... La ligne d'arrivée, le podium, le speaker... Tout est en place, bien réel !! Des centaines de personnes sont là, souriantes et décontractées, du moins en apparence...! En longues files indiennes, tous attendent leur tour pour recevoir leur sésame...
           Pour moi ce sera : Nat Nat - 6130 .
La ferveur est générale.  Et elle résonne comme le diapason donne le la... pure et obsédante à la fois...!
            Moi, elle me prend aux tripes tellement elle hurle dans ma tête... Houlala, je sens que le compte à rebours va être difficile à vivre...




            Ta bulle, Nat... Ta bulle !!!

            Pascal me propose de randonner dans la savane, histoire de me familiariser quelque peu avec le terrain, dérouiller mes jambes et surtout... décompresser !!! J'ai beau me sentir à l'aise, je dégage une tension qui semble le toucher directement...
            C'est à ce moment que quelque chose bouge en moi...
            Mes idées commencent à se rassembler, s'organiser... Mon esprit arrête de faire comme un singe fou dans sa trop petite cage, bondissant et virevoltant d'une grille à l'autre de ses parois invisibles...
            Les mots concentration et visualisation prennent tout leur sens...
            Je me connecte avec les effets de ma préparation... Chaque thématique travaillée se concrétise... Chaque expérience apporte son lot d'infos. Comme une corde à un arc : les dénivelés, l'endurance fondamentale, les escaliers, les sorties longues, les descentes, les séances d'abdos, les courses aussi, même celles non terminées... Chaque thème devient un atout que je maitrise plus ou moins, mais un atout dont je pourrai me servir pendant ma course.
            Doucement, je tisse avec les fils invisibles de cet ensemble, une sorte de toile qui m'enveloppe... Je me sens comme une chrysalide dans son cocon, attendant son heure pour s'envoler... Mais ce n'est pas encore l'heure...
            Je continue donc ce travail silencieux et mental...  Je crée ma bulle, pendant que le temps continue son œuvre.



            Jeudi :

            Inspection générale de mon matériel et préparation de mes sacs !!


              Cet exercice m'excite et me ravie à la fois... Il arrive à point nommé pour concrétiser ma course...
            - Comment m' habiller au départ, sachant que je pars à 4 heures du mat, que l'ascension du Piton des neiges n'est pas une mince affaire, que je risque d'avoir chaud mais que là-haut, à 8 heures du mat, il peut faire plus que frisquet ?... Sachant également que la descente me ramènera vers la chaleur tropicale très rapidement !!
            - Comment faire mon sac d'assistance de la mi-course, sachant qu'à ce moment là la nuit sera tombée et que je devrai gérer la fatigue et les ptits coups de mou ?...
            - Comment prévoir l'essentiel et le superflu que Jean-Pierre aura avec lui, et donc pour moi, dès qu'il pourra croiser mon chemin ?...
           
            Je passe un long moment à choisir et à décider.... Ma stratégie prend forme... Ma bulle aussi...! La chrysalide continue à tisser sa toile... Chaque étape d avant-course lui donne accès à un nouveau fil qui vient s'ajouter aux autres harmonieusement...!
            Jeudi, le départ de la Diagonale des fous est donné à 23 heures... J'ai une pensée émue pour mes amis qui se sont préparés avec moi et qui prennent le départ... Go go gooooo les garçons !!!
            La télé est bloquée sur Canalsat qui passe en boucle reportages et infos de l'événement...
            J'ai l'impression de connaître par cœur le dénivelé et les paysages vertigineux de cette course qui n'est pas la mienne...



            Vendredi :

            Je me sens et me sais silencieuse... C'est rare... Ceux qui me connaissent ne me contrediront pas ...!!
            Mes sacs sont prêts...
            Mentalement, je me sens prête.
            La chrysalide commence à se sentir à l'étroit dans son cocon, mais pourtant elle s'y sent bien... Encore trop tôt pour le déchirer...
            Matinée à la plage et sieste prolongée, tant bien que mal, jusqu'à 22 heures... J'ai la chance de pouvoir profiter des papouilles de Pierre, l'ostéopathe qui suit les garçons pendant toute leur course... Sentir ses mains expertes sur mes jambes me fait un bien fou... Mon cœur s'emballe un peu... Je commence à avoir du mal à me contenir !!!



Minuit :

            Cette fois ci, c'est le moment... Je sors de mon cocon pour le remplacer par mon équipement... La bulle qui s'est formée autour de moi est si épaisse que même le coup de fil de ma meilleure amie n'arrive à la percer... Je suis dans une sorte d'intense concentration, un calme presque douloureux s'impose à moi...
            Nous partons Jean-Pierre et moi pour Cilaos... Je me laisse bercer par la voiture qui zigzague le long des deux cents virages que forme cette étroite et vertigineuse route vers le départ...
            Mon cœur bat la chamade, pourtant je me sens très calme, comme habitée par une sorte de force intérieure...
            En fait, je n'ai plus peur.
            J'ai mentalement posé mes jalons sur ce parcours tant et tant de fois lu, vu et observé sur le papier...  De la froide et implacable ligne du profil présenté sur le site internet, au descriptif méticuleux du roadbook ; de la vidéo étape par étape de sfr.re, aux témoignages bien vivants et en images de Denis et des autres qui l'ont vécu ; rien de ce qui m'a été donné n'a échappé à mon analyse...



Samedi, 3h55...

            Le top départ va être donné... Nous sommes presque mille cinq cents dans un enclos presque trop petit pour nous... Le discours est vite envoyé... Un dernier regard pour Jean-Pierre et c'est parti... Le groupe se met en mouvement... Long serpent humain... Sous les bravos fervents des spectateurs...
            Puis, c'est le silence. Relatif... C'est bruyant finalement !! Ça cause un peu, ça s'encourage et se congratule...
            Le rythme que je m'impose est finalement celui de la plupart et j'aime ça ! Ça me rassure... Pour une fois, je suis dans le bon tempo...
            J´allume ma frontale, davantage par confort que par besoin tellement nous formons une ligne compacte et homogène ... Pourtant le groupe commence à s'étirer... Comme la guimauve dans les mains d'un confiseur...
            Et puis, arrive ( déjà ??!! ) l'ascension du Piton des neiges... c'est somptueux ... 



Je ne suis pas à la fin mais bien installée dans la seconde moitié du groupe. Et ça me plait !! C'est encore beaucoup trop tôt pour le dire mais, il semblerait que, si je tiens ce rythme, je serai "large" par rapport à la première barrière horaire...
            C'est difficile, ça fait mal et ça n'en finit pas de monter, mais je m'accroche à cette idée. Je vais y arriver !
            Enfin j'arrive au bout... Ou plutôt en haut !!
            Je réalise que je n'ai pas trop souffert, et que je tiens, bon an mal an un rythme correct !!
            Il faut encore trottiner pas mal avant d'atteindre le premier pointage !! J'y crois j'y crois... Et j'arrive avec presque trois quarts d'heure d'avance sur l'heure du couperet !Première victoire !!! Si si !!
            D'abord parce que physiquement, je tiens bien, mais surtout parce que pour la première fois, je PASSE une barrière horaire !! Et pas la moindre...
            Certains de mes amis m'ont avoué qu'ils me voyaient stopper là mon aventure !! Et bien non !!! Je l'ai fait... Et je continue !...
            En vérité, chaque passage de pointage, je le vis comme une vraie victoire !! J'exulte littéralement devant les bénévoles médusés d'abord, et ravis pour moi juste après !!
            J'ai d'ailleurs le privilège d'avoir été filmée au pointage du gite de Belouve (le second) et de faire partie du montage de la vidéo officielle  " Speciale-filles " sur la réunion-sfr.re...  Et sur le film, ma joie est palpable !!...
En voici le lien ... pour les curieux ...!!

http://grandraid.sfr.re/serv/SRRGrandRaidVideos?vid=65576&com=videsrrwebfrWEBZAPPING&vcid=32

Courazzzz !!...

Je me sens bien...
            Bien dans mon corps... Mes jambes répondent parfaitement, mon souffle est régulier et mon ptit cœur à son aise.
Bien dans ma tête. Une sorte d'euphorie me gagne, un large sourire balaie mon visage, je me sens presque en communion avec la nature dense, gorgée de vie végétale et minérale qui m'encercle. Je vois tout. Je me nourris avec gourmandise de ce spectacle tant rêvé qui s'offre à moi. J'en distille toute sa saveur...
Mon sac d'hydratation est tout simplement parfait ! Il épouse mon corps parfaitement et se fait délicieusement oublier malgré son volume et son poids.
Bref, TOUT VA BIEN.

            Je peine de plus en plus dans les montées, mais ma force est dans les descentes !! Je remercie mentalement David, le coach, pour toutes ces sorties où les descentes étaient privilégiées... Je me régale à sauter, dévaler parfois, me risquer souvent et surtout y arriver... Je double en m'excusant, tous ceux qui me doublent dans les montées, et nous jouerons à ce petit jeu longtemps... Mais les joueurs se font plus rares au fur et à mesure que la course avance...
« Courazzzz ...!! Courazzzz, Madame la zupette !!!... » Ce sont les mots que j'entends le plus autour de moi.

            La chaleur devient pénible... Et mon corps manque de carburant... Je pompe un peu dans mes réserves et je le sens !
            Enfin, je rejoins Hellbourg et son gros ravito... J'arrive à atteindre le pointage... Une minute avant la fermeture !! J'ai eu chaud !! Au propre comme au figuré...
            Je prends le temps de strapper ma cheville droite qui, après moult couinements, devient anormalement laxe et douloureuse... Un hématome s'est formé tout autour mais c'est correct. Et je soigne aussi une énorme ampoule qui s'est formée sur mon talon, côté intérieur du pied... droit !
            Je me restaure rapidement et trop peu... Ma bulle est toujours active et présente mais elle a des fuites, comme de petites fissures par lesquelles mon énergie et surtout ma sensation de " compact " s'évaporent doucement !
            Mais je repars, toujours motivée ! Je visualise mentalement la carte du dénivelé de l'ascension jusqu'à la Plaine des merles. Je sais que je vais vivre la seconde vraie difficulté de la course...
            Il fait très chaud, et j'ai de drôles de sensations... Je me sens lourde et chaque montée de marches est une difficulté... Je n'arrive plus à positiver et je m'enferme dans une sorte de labyrinthe émotionnel dont je ne trouve pas la sortie... J'ai envie de lâcher l'affaire, retrouver Jean-Pierre, me cacher sous ma couette, disparaître... Nat Nat ? Connais pô !!

            Et pourtant, je continue... Et doucement la magie opère... La nature superbe s'impose à moi et m'aide à retrouver ma lucidité envolée... Tout ce qui fait écho à ma motivation compose alors une sérénade de pensées positives : pourquoi je suis là, la chance que j'ai de vivre ça, la joie que je ressens, l'énergie de cette nature luxuriante, sauvage et violente qui m'est offerte, et Brinouille aussi, cette nouvelle étoile au dessus de ma tête...
Le sol n'en finit pas de varier ses caprices... Des grosses pierres, des racines, de la poussière rouge, fine et pénétrante, des rondins grossiers et glissants... Le tout entrecoupé de petits ruisseaux bouillonnants dans lesquels je m'asperge avec frénésie et bonheur avant de reprendre mon chemin. Chaque ruisseau est une récompense, chaque difficulté derrière moi une nouvelle petite victoire...






            J'arrive limite-limite à cette quatrième barrière !! Je ne suis plus euphorique... Juste éperdument heureuse d'avoir une nouvelle fois réussi cet " exploit ". Mon énergie s'est mise en mode économique ... Il faut préserver ma bulle ...

            Le soleil va bientôt se coucher... Je ne dois pas perdre de temps !... Jean-Pierre est là, avec ce qu'il me faut pour continuer. Un bol de soupe infâme que j'ai du mal à avaler, quelques canapés au saucisson, changement de veste, une poignée de gels supplémentaire dans le sac, un peu d'eau, une claque sur les fesses et c'est déjà reparti...
            La descente de Sentier Scout... Encore une sacrée difficulté, surtout entre chien et loup !...





L'enfer au paradis ...

            Pourtant, j'attaque cette partie avec cœur et motivation... J'y crois toujours et la perspective d'attaquer la nuit, curieusement, m'excite positivement !...
            Je sais que je joue avec le temps... Un jeu épuisant mentalement, mais dont je suis prête à relever une nouvelle fois le défi !!! Alors j'y vais... Je dévale, je joue dans les cailloux et les racines. Je dévie les pièges grossiers mais... pas tous, hélas !!!
            Une douleur me mord violemment la cheville. J'en ai le souffle coupé. Je l'avais oubliée celle-là... Tremblante, je reprends ma descente. Moins assurée, je me concentre sur le faisceau lumineux de ma frontale. Il fait chaud ? Non !! Mais je transpire sous l'effort contenu. Je reprends confiance jusqu'à une nouvelle décharge !! Et encore, et encore une...
            La nuit est totalement tombée. Les ombres qui se forment sont monstrueuses... J'ai l'impression de vivre la course folle de banche neige dans la forêt !... Les racines semblent énormes et distordues, et d'incroyables chauve-souris dodues me frôlent le visage... J'ai cru que c'était des hallus dues à la fatigue, mais on m'a bien confirmée leur présence silencieuse...
            Sauf que moi, je ne cours plus... Je choisis avec soin les pierres sur lesquelles je vais poser mes pieds.
            Je reste concentrée. Je sais que j'avance... Et que ce n'est qu'une énorme descente avant de rejoindre Aurère !
            Je me sens calme mais douloureuse. J'ai de moins en moins confiance en ma cheville. Je sens que je compense et mon genou gauche couine un peu... Histoire de faire écho !!
            À cet instant, je me maudis !!! Quelle grossière erreur ai-je fait !! En oubliant de refaire un strap tout neuf avant de repartir, j'ai quasiment annulé toutes mes chances de descendre en confiance !!!
            C'est trop bête !! J'ai pensé à manger et à boire, à me changer... Mais pas à assurer mes chevilles ni mon ampoule !...
            Tout en ruminant ces obsédantes pensées, j'ai une très mauvaise surprise... Pour atteindre Aurère et son nouveau pointage, je dois à nouveau monter un enoooooooorme escalier taillé à même la pierre... 930 mètres d'ascension presque à la verticale !!
            Ce n'est plus une course mais un chemin de croix !... Je vis l'enfer au paradis...
            Ça y est... J'ai compris... Je le sens... Ma course va bientôt s'arrêter.
            Mes forces m'abandonnent et avec, ma motivation et toutes ces magnifiques pensées !
            Ma bulle s'est évaporée à son tour, me laissant seule au milieu de la nuit, dans cet escalier infernal qui n'en finit pas...
            Et puis, enfin, la fin du cauchemar... Une lumière scintille, signifiant ainsi qu'il y a au moins une âme pas loin !...
            Et ma motivation revient aussi... Oubliées toutes ces mauvaises pensées !... Je reprends espoir ... Mon moral fait le yoyo et mes nerfs sont à vifs.
            J'arrive en boitillant au pointage, accueillie par des bénévoles enthousiastes et bienveillants !... Leurs sourires me réchauffent instantanément le cœur !... Je rassemble mes neurones éparpillés un peu partout afin de faire le point. Je peux repartir. Ce pointage n'est pas disqualificatif... Cependant, j'ai plus d'une 1/2 heure de retard sur la barrière suivante, à la Rivière de galets...
            Certes, ce n'est, cette fois-ci, que de la descente... Mais, aurai-je l'énergie ? Est ce raisonnable, compte tenu de mon état général ???
            Les questions virevoltent dans ma tête. Je dois décider vite... Si je ne veux pas perdre trop de temps...
            Ma décision sera prise assez vite. Pas question cette fois de repartir sans strap.
Direction l'infirmerie où là, le constat est sans appel !!!
            Un magnifique hématome s'est formé tout autour de ma cheville, elle-même jouant dans la catégorie " poteau ".
            Quant à mon ampoule, elle est transformée en sémaphore rougeoyant et couvre les deux tiers de l'intérieur de mon talon.
La nouveauté, toujours au pied droit (on ne change pas une équipe qui gagne hein !!...), c'est que l'ongle de mon gros orteil donne des signes inquiétants... Martyrisé comme il l'est, c'est sûr, celui-là ne passera pas l'hiver...

            À la vue de tous ces petits gâchis, je suis tellement dégoûtée que j'en vomis... Suite et fin de l'aventure !...
            Heureusement, la générosité, la gentillesse et la sympathie prodiguées par toute cette bande de joyeux bénévoles m'aident à me détendre et à apprécier ce moment, une fois de plus, unique... Un magnifique cadeau !
            Je vais passer la nuit à Aurère, au cœur du cirque de Mafate. Au cœur de cette nature tellement plus forte que moi mais tellement attirante...
Dans le noir du dortoir improvisé, dans l'unique salle de classe de l'école d'Aurère, je revis ma course. Les images et les émotions défilent en accéléré. Les larmes coulent sans bruit sur mes joues...

Arrêt sur image. Nuit !

Le lendemain, c'est l'effervescence dès 6h00.
Tout doit être rassemblé avant 7 heures, heure à laquelle l'hélicoptère débutera son ballet aérien pour transporter tous les ballots contenant le poste de ravito ... Le ciel, l'accès le plus facile pour accéder au plus profond de ce cirque ... Et sinon ... C'est à pied ...

            Petit déj animé, dernier soin aux bobos et je me mets en marche. Je suis engourdie, mais je ne souffre pas vraiment. Ma cheville me boude, mon ampoule aussi ! ... Quant à mon gros orteil, j'ai l'impression qu'il va exploser ...
            Je vis mon cadeau de consolation... La descente vers la Rivière de Galets est splendide, vertigineuse et technique. Je suis pétrifiée par la majesté des paysages... À nouveau, j'en pleure d'émotions...
            Je me lâche un peu... C'est bon !!
            Des larmes pour ce défi que je n'ai pas pu relever jusqu'au bout.
            Des larmes pour cette aventure qui se termine.
            Des larmes pour tout ce concentré d'émotions qui fait battre mon cœur si fort.
            Des larmes pour la joie d'avoir pu participer et vivre tout ça.
            Des larmes de fierté pour le chemin parcouru et les difficultés surmontées.
            Des larmes de bonheur d'avoir réussi ÇA !!!




17 heures de course et presque 60 km parcourus. 5 barrières horaires franchies. 5,5 litres d'eau avalés, 1 paire de chaussures explosée, et des milliers de sensations plein le corps et la tête...
J'avais prévu d'écouter de la musique pour m'accompagner dans la nuit. Je ne l'aurais finalement pas entendue une seule fois... La sauvage symphonie qui m'a été offerte était encore plus belle...
            Mon téléphone lui aussi est resté éteint pendant toute mon aventure, afin d'être sûre de rester dans ma bulle...
            Seules mes pensées vagabondaient et me tenaient compagnie.
            C'était le bon choix...

            En allant chercher au stade de la Redoute le sac d'assistance que je n'ai donc pas utilisé, j'ai croisé des centaines de coureurs et leurs amis. Certains semblaient fatigués mais tous avaient ce sourire particulier aux lèvres...
            Je pense avoir le même depuis... Et qui ne s'estompe pas encore...Celui du plaisir d'avoir tenté un truc de fou... Et d'être sans doute allée un peu plus loin au bout de moi-même...




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